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Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/88

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chose de moins épais, de moins empâté dans les allures. Seulement sa physionomie était aussi moins ouverte, moins franche, et la prunelle avait parfois de mauvais éclairs, comme des restes de tempête, une trace de la vie accidentée menée là-bas.

Autour d’eux Yvonne allait, venait, prenant parfois part à la conversation, l’air de comprendre, d’être au courant des choses ; puis s’oubliant dans un commencement de chanson qui montait tout à coup du fond de sa gorge pour rouler, monotone et berceuse, à travers les causeries.

Elle semblait avoir immédiatement pris en affection le nouveau venu, dont la présence ne paraissait pas la surprendre ; elle allait de temps en temps à lui, afin de lui conter mystérieusement quelque chose qui n’était qu’un composé de phrases décousues, sans suite, où il était surtout question du petit Jean-Marie Hervé, des mousses, de paroles entendues sur la grève ou dans la lande :

— Tu sais, disait-elle, je cause beaucoup avec les coquillages, moi, et ils me répondent !… Par eux je sais tout ce qui se passe au fond de la mer !… Tu ne le diras pas, jamais, jamais !… Chut ! tais-toi, tu as sa voix ?… Mon petit frère a parlé ; il est dans un beau palais de coquilles, où vont les poissons !… Ah ! ah ! ah ! que c’est amusant !… Tu es drôle, drôle !… Ah ! ah ! ah !…

Son rire reprenait, brisant le semblant d’en-