Page:Guy de Maupassant - Notre Cœur.djvu/44

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papiers traînants, lettres pliées, petites enveloppes déchirées, où brillaient des initiales dorées. Car c’était là qu’elle écrivait et qu’elle vivait quand elle était seule.

Étendue sur sa chaise longue, dans une robe de chambre en foulard de Chine, les bras nus, de beaux bras souples et fermes sortant hardiment des grands plis de l’étoffe, les cheveux relevés et pesant sur la tête de leur masse blonde et tordue, Mme de Burne rêvassait, après le bain.

La femme de chambre frappa, puis entra, apportant une lettre.

Elle la prit, regarda l’écriture, déchira le papier, lut les premières lignes, puis dit tranquillement à sa domestique : « Je vous sonnerai dans une heure ».

Restée seule, elle sourit avec une joie victorieuse. Les premiers mots lui avaient suffit pour comprendre que c’était là, enfin, la déclaration d’amour de Mariolle. Il avait résisté bien plus qu’elle n’aurait cru, car depuis trois mois elle le captait avec un grand déploiement de grâce, des attentions et des frais de charme qu’elle n’avait jamais faits pour personne. Il semblait méfiant, prévenu, en garde contre elle, contre l’appât toujours tendu de son insatiable coquetterie. Il avait fallu bien des causeries intimes, où elle avait donné toute la séduction physique de son être, tout l’effort captivant de son esprit, et aussi bien des