Ha ! que je doy caresser ta venue,
Discord heureux ! Ha ! que je dois encor
M’en resjouir ! Par elle je suis or
Libre et ma foy n’est plus en rien tenue.
Pour ce bienfait, ô discord, je te veux
Donner chasque an, plein de zèle et de vœux,
Maint holocauste, et mainte offre te faire
Sur un autel que je te dedieray,
Où à chacun hautement je diray
Que quelquefois tu nous es nécessaire.
XXI
Las ! qu’en Amour je suis infortuné !
Toutes les fois que ma chère maistresse
À volonté de me faire largesse
De ses baisers, je suis importuné.
Tousjours quelqu’un à nuire destiné
Rompt ses desseins et fraude ma liesse.
Si que je n’ay souvent qu’une tristesse
Au lieu du bien qui m’estoit ordonné.
Non ! je voudrois que la fiere tempeste
En cent morceaux eust escrasé la teste
Du malheureux qui m’osta le moyen
Hier au soir de baiser ma Carite
Et qui causa que pour lors mon mérite
Fut seulement recompensé d’un rien.
XXII
Ce brasselet, que je gardois pour gage
De nostre ferme et sincère amitié,
S’est à la fin rompu par la moitié
Sans luy avoir pourchassé nul outrage.