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Page:Guyau - L’Art au point de vue sociologique.djvu/19

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introduction

mais ce n’est pas encore assez pour nous faire vouloir de la même manière : le grand secret, c’est de nous faire sentir tous de la même manière, et voilà le prodige que l’art accomplit.


II. — D’après ces principes, l’art est d’autant plus grand, selon Guyau, qu’il réalise mieux les deux conditions essentielles de cette société des sentiments.

En premier lieu, il faut que les sensations et sentiments dont l’art produit l’identité dans tout un groupe d’individus soient eux-mêmes de la nature la plus élevée ; en d’autres termes, il faut produire la sympathie des sensations et sentiments supérieurs. C’est ce qu’on oublie trop à notre époque, où les littérateurs, par une fausse interprétation du réalisme, insistent surtout sur les côtés inférieurs de notre être. Mais en quoi consistera la supériorité dont nous parlons ? Précisément en ce que les sensations et sentiments supérieurs auront un caractère à la fois plus intense et plus expansif, par conséquent plus social : — « La solidarité sociale est le principe de l’émotion esthétique la plus haute et la plus complexe. » Les plaisirs qui n’ont rien d’impersonnel n’ont rien de durable ni de beau : « Le plaisir qui aurait, au contraire, un caractère tout à fait universel, serait éternel ; et étant l’amour, il serait la grâce. C’est dans la négation de l’égoïsme,