dans l’art, au contraire, finit par faire de l’art une chose tout artificielle et conséquemment morte. Un des défauts caractéristiques auxquels se laisse aller celui qui vit trop exclusivement pour l’art et s’attache au culte des formes, c’est de ne plus voir et sentir avec force dans la vie que ce qui lui paraît le plus facile à représenter par l’art, « ce qui peut immédiatement se transposer dans le domaine de la fiction. » Flaubert, qui était artiste dans la moelle des os et qui s’en piquait, a exprimé cet état d’esprit avec une précision merveilleuse : selon lui, vous êtes né pour l’art si les accidents du monde, dès qu’ils sont perçus, vous apparaissent transposés comme pour l’emploi d’une illusion à décrire, tellement que toutes les choses, y compris votre existence, ne vous semblent pas avoir d’autre utilité. Guyau répond à Flaubert qu’un être ainsi organisé échouerait au contraire dans l’art : « il faut croire en la vie pour la rendre dans toute sa force ; il faut sentir ce qu’on sent, avant de se demander le pourquoi et de chercher à utiliser sa propre existence. C’est s’arrêter à la superficie des choses que d’y voir seulement des effets à saisir et à rendre, de confondre la nature avec un musée, de lui préférer même au besoin un musée. » Le grand art est celui qui traite la nature et la vie « non en illusions, mais en réalités », et qui
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