seulement élargi la science, il l’a considérablement approfondie, il l’a fait passer du dehors au dedans ; la physiologie s’est perfectionnée assez pour toucher à la psychologie, et, à mesure que la science du système nerveux est allée grandissant, on a mieux compris combien étaient insuffisantes les vues du matérialisme brut et égoïste. D’un côté, la matière s’est subtilisée toujours davantage sous l’œil du savant, et le mécanisme d’horlogerie de La Mettrie est devenu tout à fait impuissant à rendre compte de la vie : la physiologie s’est affirmée à part et au-dessus de la physique élémentaire. D’un autre côté l’individu, que l’on considérait comme isolé, enfermé dans son mécanisme solitaire, est apparu comme essentiellement pénétrable aux influences d’autrui, solidaire des autres consciences, déterminable par des idées et sentiments impersonnels. Il est aussi difficile de circonscrire dans un corps vivant une émotion morale, esthétique ou autre, que d’y circonscrire de la chaleur ou de l’électricité ; les phénomènes intellectuels ou physiques sont essentiellement expansifs ou contagieux. Les faits de sympathie, soit nerveuse, soit mentale, sont de mieux en mieux connus ; ceux de contagion morbide, ceux de suggestion et d’influence hypnotique commencent à être étudiés scientifiquement. De ces cas maladifs, qui sont les plus faciles
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