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GENÈSE DE L’IDÉE DE TEMPS

de ligne, dans laquelle toutes les représentations lointaines tendent à s’effacer pour laisser place à d’autres représentations toujours plus nettes. Tout changement produit ainsi dans l’esprit une sorte de traînée lumineuse analogue à celle que laissent dans le ciel les étoiles filantes. Au contraire, un état fixe apparaît toujours avec la même netteté, dans le même milieu, comme les grands astres du ciel. Ajoutons donc encore aux éléments qui précèdent les résidus, de netteté et d’intensité différentes, laissés dans la mémoire par le changement.

La preuve que la représentation de l’avant et de l’après est un jeu d’images et de résidus, c’est que nous pouvons très bien les confondre. C’est ce qui arrive dans les expériences psychophysiques où le sujet note un son avant de l’avoir entendu, et surtout dans les expériences où, étant données deux étincelles successives rapprochées, il confond celle qui est apparue la première avec la seconde. Dans le phénomène de l’attente vive, on peut se représenter si fortement le son attendu qu’on l’entend avant qu’il ne se produise. Quant à l’ordre interverti entre les étincelles, il vient sans doute de ce que l’attention, s’appliquant tantôt à l’une, tantôt à l’autre, grossit celle à laquelle elle s’attache, lui donne