Page:Guyau - Les Problèmes de l’esthétique contemporaine.djvu/228

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eux-mêmes une sorte de bouleversement du vers. Au fond, c’est sa simplicité qui a fait sa fécondité. V. Hugo ne supprime pas la césure, il la multiplie, il en place une seconde après la première, et le vers y gagne au lieu d’y perdre. Donc, le « vers romantique » et le « vers classique, » si souvent opposés par nos poètes, ne font qu’un ; l’alexandrin, tel que l’a conçu V. Hugo, n’est pas un vers nouveau ; c’est le vers classique arrivé à son plein développement, et possédant la plus grande complexité rythmique sans avoir perdu rien de son nombre ni de sa mesure. On a dit que l’avenir de la musique moderne était dans la variété des rythmes ; ainsi en est-il de la poésie,

Peinture qui se meut et musique qui pense[1], mais à la condition quela variété des rythmes n’altère jamais au fond la mesure.

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    mot de deux syllabes, comme aime, plane, etc., ce qui atténue encore la surprise de l’oreille.

    Et les coups furieux pleuvent ; son agonie…


    Ce beau vers est d’autant plus irréprochable que, malgré le temps fort de la septième syllabe, il revient ensuite à la vraie forme du vers romantique, huit et quatre.

    En résumé, on peut simplifier la théorie du vers dit romantique en ramenant toutes ses formes à quatre, dont la première seule est et doit être fréquemment usitée : 8 et 4 (ou 4 et 8), 10 et 2 (ou 2 et 10), 9 et 3 (ou 3 et 9), 7 et 5 (ou 5 et 7). Par là tombent certaines affirmations contenues dans le traité de M. Becq de Fouquières sur la versification française.

  1. É. Deschamps.