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Page:Guyau - Les Problèmes de l’esthétique contemporaine.djvu/247

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et tantôt sonores : Vénus, nus ; Nil, chenil ; héros, rhinocéros ; tous, doux ; maïs, pays.

Maintenant, lorsqu’une voyelle et la consonne qui la suit sont identiques, faut -il demander encore davantage et exiger, avec M. de Banville, l’identité de la consonne qui précède, dite consonne d’appui ? Sans doute, cela est préférable ; mais on ne peut le déduire scientifiquement des principes du vers, parce que l’identité de la voyelle et des dernières consonnes suffit très bien pour marquer le rythme et remplir ainsi le but essentiel de la rime. La voyelle émise, avec l’accord qu’elle produit, l’esprit reste sur une idée de ressemblance plutôt que de différence ; lorsque la voyelle est longue ou suivie de consonnes sonores, la différence même tend à disparaître : c’est plus qu’il n’en faut pour constituer le vers. — Quant à la rime proprement « riche » ou superflue, formée par la double consonance de deux syllabes à la fois, elle vaut précisément parce qu’elle n’est et ne sera jamais trop fréquente. Il ne faudrait pas prendre pour modèles ces deux vers gravement comiques des chœurs de Racine :


         Pour comble de prospérité,
Il espère revivre en sa postérité.


L’abus des consonances serait mauvais en poésie comme en musique ; la dissonance même est un élément d’harmonie, qui acquiert une importance croissante dans la musique moderne et qui a sa valeur jusque dans la poésie. C’est ce qu’a compris V. Hugo dans certains de ses vers, comme La Fontaine et Musset. L’harmonie est