Cependant bientôt toutes les fleurs se fanent et tombent,
les fruits nouent et croissent sur les branches qui commencent à ployer sous le fardeau pesant ; le soleil, en prenant
de la force, les colore par sa chaleur. Chacun s’approche,
les uns les cueillent avec la main, les autres secouent la
branche ; on ne voit de tous côtés que des pommes, tous les
sacs, tous les paniers sont pleins ; chacun charge son épaule
d’un fardeau pesant, la grande voiture est remplie jusqu’au
comble, les quatre bœufs s’arrêtent tout court, le cheval vigoureux est essoufflé. L’essieu de fer lui-même craque sous
son poids. Déjà j’entends le pilon frapper sur la pomme, le
pressoir qui crie pour serrer la masse ; je vois se précipiter
de la tablette, un ruisseau de cidre doux comme le miel ;
Je vois les barriques les tonnes remplies, et bientôt toutes
les chopines pleines sur la table. Tout le monde est joyeux,
les voix s’élèvent ; et même les demi-muets caquettent à qui
mieux mieux. Buvez, ô mes compatriotes, étanchez tous
votre soif, oubliez un instant vos pénibles travaux. Cependant, veillez bien, au sein de la joie, et n’abusez pas des
dons de Dieu. Chaque chose a des bornes, chacun doit
être réglé dans le boire, s’il ne veut pas mal faire.
Gardez dans un lieu frais, votre meilleure boisson pour les travaux si pénibles de l’été, gardez-en pour le beau jour, pour le jour heureux où vous marierez quelqu’un de vos enfants.
Si vous ne voulez avoir des bestiaux de peu d’apparence et de peu de valeur, n’élevez encore chaque année que les meilleurs veaux, et, si vous ne m’en croyez pas, écoutez l’histoire d’un pauvre laboureur de notre pays :