Page:Guyot - Les principes de 89 et le socialisme.djvu/159

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leur avait dit que leur idéal était la conquête de « l’assiette au beurre ».

Ils venaient précisément pour la briser, au profit de cet idéal élevé et désintéressé qu’ils ont appelé et qui continue de s’appeler les Droits de l’Homme.

Sous la féodalité, la politique du seigneur comme du roi avait été la possession de l’assiette au beurre : chacun voulait obtenir plus de terres et plus de droits attachés à cette terre.

Quand le roi fut parvenu à devenir le plus puissant des seigneurs et à se considérer comme le maître des biens et des personnes de tous ses sujets, la politique fut de pratiquer son culte de manière à en recevoir le plus de faveurs possibles. Le courtisan de Versailles avait pour politique la possession de l’assiette au beurre.

Mais nulle part on ne trouve dans les cahiers des États généraux la préoccupation de faire passer « l’assiette au beurre » de la noblesse ou du clergé au tiers état. Ce qu’on demande, c’est la suppression de tous privilèges, c’est la liberté, c’est l’égalité.

Le pouvoir, on le demande pour « la nation ». Mais qu’entend-on par cette entité ? C’est qu’il ne soit plus confiné dans des castes, c’est que tous les citoyens, sans exception, aient le droit d’y participer sans autre distinction entre eux que celles qui proviennent des capacités.

Ce sont ces principes qui se sont maintenus pendant toute la durée de la Révolution et je dirai sous l’Empire, alors même que l’homme qui voulait parvenir devait faire en sorte de gagner les faveurs de l’empereur. Mais dans la conception de son abso-