Page:Gyp - Bijou, Calmann-Levy, 1896.djvu/67

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— Pierrot !… — appela la marquise — donne-moi La Bruyère… tu sais où il est ?…

— Qui ça ?… — demanda le gamin en clignant de l’œil.

— La Bruyère ?…

— Vous allez voir… — dit M. de Jonzac en regardant son fils d’un air désolé — qu’il ne sait pas ce que c’est que La Bruyère !…

Pierrot protesta avec énergie :

— Si, je sais ce que c’est !… la preuve… c’est un dos bleu !

La vieille marquise demanda :

— Un quoi ?…

— Un dos bleu, ma tante…

M. Giraud intervint :

— Expliquez à madame votre tante que vous avez la fâcheuse manie de désigner les livres par la couleur de leur reliure plutôt que par leur titre…

— Parbleu !… — fit M. de Jonzac indigné, — il n’en ouvre jamais un seul… il est d’une ignorance !… quand je pense qu’il va avoir dix-sept ans !…

— Ce pauvre Pierrot !… — dit Bijou compatissante, — il n’est pas si ignorant que ça !…

Et, comme son oncle ne répondait rien, elle ajouta :

— Et puis, il est si gentil !… et il se porte si bien !…

M. de Jonzac répondit :

— Oh ! quant à ça !… il craque de santé… et ça le rend encore plus insupportable… mais pas plus intelligent… on s’est plaint du surmenage intellectuel, on a dit qu’il abrutissait les enfants… et on