Page:Héricourt - La Femme affranchie.djvu/161

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ses engagements d’intérêts : en faisant tort à sa compagne, en échappant aux charges de la paternité, il userait de sa liberté pour nuire à autrui : la société a le droit de ne le pas souffrir.

La jeune femme. Ainsi, Madame, vous ne reconnaissez pas à la Société le droit de lier les âmes ni les corps ; mais celui d’être garante du contrat de Mariage, et de lobligation des époux envers les enfants futurs ; de les forcer, en cas de séparation, à remplir cette dernière obligation ?

L’auteur. Oui, Madame ; ainsi, en cas de rupture, la Société n’aurait qu’à constater publiquement les charges des époux, le nombre des enfants, le nom de celui des deux auquel la tutelle en est restée, soit de consentement mutuel, soit d’autorité sociale. En se bornant à ce rôle, la société ferait plus pour empêcher la séparation des époux que tout ce qu’elle a follement imaginé jusqu’ici. Les ex-conjoints seraient libres de se remarier : mais quelle femme voudrait s’unir à un homme chargé de plusieurs enfants, ou qui se serait mal comporté avec sa première compagne ? Quel homme consentirait à s’unir à une femme qui se trouverait dans le même cas ?

Pensez-vous que la difficulté qu’on éprouverait à contracter un nouveau mariage, ne serait pas un frein à l’inconstance et aux mauvais procédés qui conduisent à une rupture ?

La jeune femme. Je crois en effet que le mariage, tel que vous le concevez, aurait plus de chances de durée que le nôtre : d’abord parce qu’il est dans notre nature de tenir davantage à ce qu’on peut perdre. Je me suis demandé souvent pourquoi beaucoup d’hommes demeurent fidèles à leur maîtresse et ont envers elle de bons procédés, tandis qu’ils en manquent à l’égard