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l’équilibre se rétablit par la démoralisation des deux sexes, la désolation des familles, la mine des fortunes, l’étiolement de la génération présente et future.

La jeune femme. En vérité. Madame, quoique le moyen âge fut bien travaillé par des doctrines contraires à la dignité de la femme, les barons féodaux lui étaient moins opposés que les fils de leurs serfs émancipés : Si j’ai bonne mémoire, plusieurs femmes ont porté le bonnet de docteur dans ces temps anciens, et ont occupé, surtout en Italie, des chaires de Philosophie, de Droit, de Mathématique, et ont excité l’admiration et l’enthousiasme. Si j’ai bonne mémoire encore, plusieurs femmes ont été reçues docteur en médecine, et c’étaient la plupart du temps les châtelaines qui exerçaient autour d’elles l’art de guérir ; beaucoup d’entre elles savaient préparer des baumes. Aujourd’hui l’une des fonctions, surtout, qu’on ne confie pas à notre sexe est l’exercice de la médecine. Il me semble cependant qu’une société faisant quelque cas de la pudeur, ne devrait pas hésiter à en confier l’exercice aux femmes qui ont aptitude. Que les hommes soient traités par les hommes, cela se conçoit ; mais qu’une femme confie les secrets de son tempérament à un homme, que cet homme, cet étranger, pose ses yeux et sa main sur son corps, c’est une impudeur, c’est une honte !

L’auteur. N’est-ce pas la faute des hommes qui persuadent aux femmes que leur sexe, n’ayant pas aptitude à la science, il n’y aurait pas sécurité pour elles à se mettre entre les mains d’un médecin de leur sexe ? N’est-ce pas la faute des hommes qui exigent de leurs femmes qu’elles se fassent assister par un accoucheur au lieu d’une accoucheuse ?