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goélette ailée

Ils ont passé, bondissants, tapageurs.

Des goëlands, des mouettes nous suivent patiemment. Serons-nous accalminés des heures ?

Le soleil a disparu puis le crépuscule. Voici la nuit.

Contemplative, je vis ma vie intérieure.



Il me faut le large et l’horizon pour penser. L’infini sans commencement ni fin se déroule à regarder l’immensité d’eau.

Ainsi l’on peut voir sa vie dans les moindres détails comme on la verrait projetée sur un écran.

À terre, on ne peut pas se reprendre, car on n’a pas le pouvoir d’arrêter la vie, on n’a pas le recul nécessaire pour la regarder.

Il y a aussi trop de monde, trop de bruit. Tous ses objets tassés autour de vous arrêtent vos gestes comme vos regards et vous devez toujours comme dans un cirque tourner sans avoir le temps de descendre en vous-même pour juger les grands événements de votre existence.

Je plains ceux dont l’esprit capté se heurte entre quatre murs car je suis de celles qui ne veulent plus d’entraves et, libres, errent en regardant et en écoutant l’eau chanter !