Rien ne pouvait nous arriver pour nous empêcher de gagner, et cependant à la mer on ne sait jamais… Et le silence le plus angoissant pesait à bord ; nous n’osions pas nous regarder, nous réjouir encore, l’équipage, et Bouché à la barre, impassible pour nous, était anxieux et la gorge sèche !
Mais nous approchions et bientôt… Je n’oublierai jamais la lenteur, la pesanteur de l’arrivée de notre plus belle victoire !
Nous approchions rapidement, les pavillons orange claquaient bien dans la brise, qui ne pouvaient plus ni refuser ni calmir.
Mais le silence suffocant régnait encore à bord. Lorsque à 100 mètres de l’arrivée d’un yacht allemand un cri déchira l’air :
— Vive Madame Hériot !
— Vive la France !
Ce fut un grand réveil ! pour nous, éclatant, brutal ; les nerfs se détendirent ; frémissants de joie, nous dépassâmes les pavillons, et je vis, sur le bateau de guerre, un officier donner le « top » pour tirer le coup de canon !
Victoire ! Victoire ! Victoire !
Et ce furent des hourras, des hurlements, des sirènes, une rumeur confuse s’éleva de tous les bateaux mouillés, de tout ce qui naviguait sur le Zuyderzée.
Nous hurlâmes, pour la France, les « hip-hip hourra » !