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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

Mais, s’il faut en croire les Lacédémoniens, ils entreprirent cette expédition moins pour accorder aux exilés les secours qu’ils demandaient, que pour se venger des Samiens, qui avaient enlevé le cratère qu’ils portaient à Crésus, et, un an auparavant, le corselet qu’Amasis, roi d’Égypte, leur envoyait en présent.

Ce corselet était de lin, mais orné d’un grand nombre de figures d’animaux tissues en or et en coton. Chaque fil de ce corselet mérite en particulier notre admiration. Quoique très-menus, ces fils sont cependant composés chacun de trois cent soixante autres fils, tous très-distincts. Tel est aussi cet autre corselet dont Amasis fit présent à Minerve de Linde.

XLVIII. Les Corinthiens contribuèrent aussi avec beaucoup d’ardeur à l’expédition des Spartiates contre Samos. Les Samiens les avaient outragés une génération avant cette guerre, et sans doute vers le temps de l’enlèvement du cratère.

Périandre[1], fils de Cypsélus, envoyait à Alyattes, à Sardes, trois cents enfants des meilleures maisons de Corcyre, pour en faire des eunuques. Les Corinthiens qui les conduisaient étant abordés à Samos, les Samiens furent bientôt instruits du dessein dans lequel on conduisait ces enfants à Sardes. Ils leur apprirent d’abord à embrasser le temple de Diane en qualité de suppliants ; après quoi ils ne voulurent jamais permettre qu’on les en arrachât. Mais comme les Corinthiens empêchaient qu’on ne leur portât à manger, les Samiens instituèrent une fête qu’ils célèbrent encore aujourd’hui de la même manière. Dès que la nuit était venue, et tout le temps que les jeunes Corcyréens restèrent dans ce temple en qualité de suppliants, ils y établirent des chœurs de jeunes garçons et de jeunes filles, tenant à la main des gâteaux de sésame et de miel. Ils avaient institué

  1. Ce tyran est mis au nombre des sept sages. Cependant Platon met en sa place Myson, de Chen en Laconie. Je ne puis croire que ce philosophe l’ait jugé indigne de ce titre à cause qu’il était tyran, comme le pense saint Clément d’Alexandrie : je crois plutôt que la tradition sur ces sept sages étaient fort incertaine, puisqu’on mettait en la place de Périandre tantôt Anarcharsis, tantôt Épiménis de Crète, tantôt Arcésilaüs d’Argos, et Myson de Chen. (L.)