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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

n’avait jamais vu Smerdis, fils de Cyrus, et qu’elle ne connaissait pas plus celui qui l’avait admise au nombre de ses femmes. « Si vous ne connaissez pas Smerdis, fils de Cyrus, lui fit dire une seconde fois Otanes, du moins demandez à Atosse quel est cet homme avec qui vous habitez l’une et l’autre : elle doit connaître parfaitement son frère Smerdis. » Sa fille répondit à cela : « Je ne puis parler à Atosse, ni voir aucune des autres femmes. Dès que cet homme, quel qu’il puisse être, s’est emparé du trône, il nous a dispersées dans des appartements séparés. »

LXIX. Sur cette réponse, l’affaire parut beaucoup plus claire à Otanes. Il envoya un troisième message à Phédyme. « Ma fille, lui fit-il dire, il faut qu’une personne bien née, comme vous, s’expose au danger ; c’est votre père qui vous y engage, c’est lui qui vous l’ordonne. Si le roi n’est point Smerdis, fils de Cyrus, mais celui que je soupçonne, il ne convient pas que vous soyez sa femme, ou qu’il occupe impunément le trône de Perse ; il mérite d’être puni. Suivez donc mes conseils, et faites ce que je vais vous prescrire. Quand il reposera auprès de vous, et que vous le saurez profondément endormi, tâtez-lui les oreilles : s’il en a, c’est le fils de Cyrus ; s’il n’en a point, c’est Smerdis, le mage. »

Phédyme lui fit dire qu’elle s’exposerait à un grand danger ; qu’il n’y avait pas à douter que, si le roi n’avait pas d’oreilles, et qu’il la surprît cherchant à s’en assurer, il ne la tuât sur-le-champ ; que néanmoins elle lui promettait d’exécuter ses ordres. Il faut remarquer que Cyrus, fils de Cambyse, avait fait couper, pendant son règne, les oreilles à Smerdis pour quelque affaire grave.

Les femmes, en Perse, ont coutume de coucher avec leurs maris chacune à leur tour. Celui de Phédyme étant venu, elle exécuta ce qu’elle avait promis à son père. Quand elle vit le mage profondément endormi, elle porta la main sur ses oreilles, et, ayant reconnu sans peine qu’il n’en avait point, elle en instruisit son père dès qu’il fut jour.

LXX. Otanes prit avec lui Aspathines et Gobryas, qui étaient les premiers d’entre les Perses, et sur la foi des-