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CLIO, LIVRE I.

XVI. Ardys régna quarante-neuf ans, et eut pour successeur Sadyattes son fils, qui en régna douze. Alyattes succéda à Sadyattes. Il fit la guerre aux Mèdes et à Cyaxare, petit-fils de Déjocès. Ce fut lui qui chassa les Cimmériens de l’Asie. Il prit la ville de Smyrne, colonie de Colophon. Il entreprit aussi une expédition contre Clazomènes, de devant laquelle il se retira, non comme il le voulut, mais après avoir reçu un échec considérable. Il fit encore durant son règne d’autres actions, dont je vais rapporter les plus mémorables.

XVII. Son père lui ayant laissé la guerre contre les Milésiens, il la continua, et attaqua Milet de la manière que je vais dire. Lorsque la terre était couverte de grains et de fruits, il se mettait en campagne. Son armée marchait au son du chalumeau, de la harpe, et des flûtes masculines et féminines[1]. Quand il était arrivé sur les terres des Milésiens, il défendait d’abattre les métairies, d’y mettre le feu et d’en arracher les portes ; il les laissait subsister dans l’état où elles étaient : mais il faisait le dégât dans le pays, coupait les arbres, ravageait les blés ; après quoi il s’en retournait sans assiéger la place ; entreprise qui lui eût été inutile, les Milésiens étant maîtres de la mer. Quant aux maisons, Alyattes ne les faisait pas abattre, afin que les Milésiens, ayant toujours où se loger, continuassent à ensemencer et à cultiver leurs terres, et qu’il eût de quoi piller et ravager lorsqu’il reviendrait dans leur pays.

XVIII. Il leur fit de cette manière onze ans la guerre, pendant lesquels les Milésiens essuyèrent deux échecs considérables : l’un à la bataille qu’ils donnèrent dans leur pays, en un endroit appelé Liménéion ; l’autre, dans la plaine du Méandre. Des onze années qu’elle dura, les six premières appartiennent au règne de Sadyattes, fils d’Ardys, qui dans ce temps-là régnait encore en Lydie. Ce fut lui qui l’alluma, et qui entra alors, à la tête d’une ar-

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  1. Il y avait deux sortes de flûtes, dont l’une, percée d’un petit nombre de trous, rendait un son grave ; l’autre, percée d’un plus grand nombre de trous, rendait un son plus clair et plus aigu. Hérodote nomme la première flûte masculine ; la seconde, flûte féminine. (L.)