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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

et se mettrait en sa place, ne pensa plus à la quitter. Dès qu’il fut rentré dans la citadelle, il manda les citoyens l’un après l’autre, comme s’il eût voulu leur rendre compte de l’administration des finances ; mais ils furent arrêtés et mis aux fers. Pendant qu’ils étaient en prison, Mæandrius tomba malade. Son frère Lycarète crut qu’il n’en reviendrait point, et, pour usurper plus facilement la puissance souveraine dans Samos, il fit mourir tous les prisonniers : car il paraît bien que les Samiens regardaient comme une chose indigne d’un homme libre d’obéir à un tyran.

CXLIV. Cependant les Perses qui ramenaient Syloson étant arrivés à Samos, n’y trouvèrent pas la moindre résistance. Ceux du parti de Mæandrius, et Mæandrius lui-même, leur déclarèrent qu’ils étaient prêts à capituler et à sortir de l’île. Otanes accepta cette proposition ; et lorsque le traité eut été conclu, les gens les plus distingués d’entre les Perses firent apporter des siéges, et s’assirent devant la forteresse.

CXLV. Le tyran Mæandrius avait un frère, nommé Charilée, dont l’esprit n’était pas fort sain, et qu’on tenait enchaîné dans une prison souterraine pour quelque faute qu’il avait commise. Charilée, informé de ce qui se passait, et ayant vu par une ouverture de sa prison les Perses tranquillement assis, se mit à crier qu’il voulait parler à son frère. Mæandrius, qui l’avait entendu, ordonna de le délier, et de le lui amener. Il n’eut pas plutôt été amené, que, chargeant son frère d’invectives, il tâcha de l’engager à se jeter sur les Perses. « Ô le plus lâche de tous les hommes ! tu as bien eu le cœur assez dur pour me faire enchaîner dans une prison souterraine, moi qui suis ton frère, et qui n’ai mérité par aucun crime un pareil traitement, et tu n’as pas le courage de te venger des Perses, qui te chassent de ta maison et de ta patrie, quoiqu’il te soit facile de les vaincre ! Mais, si tu les redoutes, donne-moi tes troupes auxiliaires, et je les ferai repentir d’être venus ici. Quant à toi, je suis prêt à te renvoyer de cette île. »

CXLVI. Ainsi parla Charilée. Mæandrius prit en bonne