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POLYMNIE, LIVRE VII.

à nos pères, ni qu’en donnant du secours aux Grecs, vous vous déclariez nos ennemis. Restez tranquilles chez vous. Si cette expédition a le succès que j’attends, je vous traiterai avec plus de distinction qu’aucun autre peuple. » On ajoute que, quoique ces propositions eussent paru de la plus grande importance aux Argiens, ils ne firent d’abord d’eux-mêmes aucune demande aux Grecs ; mais que, lorsque ceux-ci les sollicitèrent d’entrer dans leur ligue, ils exigèrent une part dans le commandement des armées, afin d’avoir un prétexte de demeurer tranquilles, sachant bien que les Lacédémoniens ne voudraient pas le partager avec eux.

CLI. Il y a des Grecs qui rapportent une histoire qui s’accorde très-bien avec celle-là, et qui n’arriva que beaucoup d’années après. Les Athéniens, disent-ils, avaient député pour quelques affaires à Suses, ville de Memnon[1], des ambassadeurs, et entre autres Callias, fils d’Hipponicus. Dans le même temps, les Argiens y avaient aussi envoyé des ambassadeurs, pour demander à Artaxerxès, fils de Xerxès, si l’alliance qu’ils avaient contractée avec Xerxès subsistait encore, ou s’il les regardait comme ennemis. Le roi Artaxerxès répondit qu’elle subsistait, et qu’il n’y avait point de ville qu’il aimât plus que celle d’Argos.

CLII. Au reste, je ne puis assurer que Xerxès ait envoyé un héraut à Argos pour dire aux Argiens ce que je viens de rapporter, ni que les ambassadeurs des Argiens se soient transportés à Suses pour demander à Artaxerxès si l’alliance subsistait encore avec lui. Je rapporte seulement les discours que les Argiens tiennent eux-mêmes. Tout ce que je sais, c’est que si tous les hommes portaient en un même lieu leurs mauvaises actions pour les échanger contre celles de leurs voisins, après avoir envisagé celles des autres, chacun remporterait avec plaisir ce qu’il aurait porté à la masse commune. Il y a sans doute des actions encore plus honteuses que celles des Argiens. Si je suis obligé de rapporter ce qu’on dit, je ne dois pas du moins

  1. Cette ville avait été bâtie par Titonus, père de Memnon : Hérodote l’appelle toujours ville memnonienne. Sa citadelle se nommait Memnonium. (Strabon, lib. xv.)

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