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VIE D’HOMÈRE.

Homère y consentit. Glaucus le lui présenta. Cet homme de Chios, lui trouvant de l’esprit et beaucoup de connaissances, l’engagea à demeurer chez lui, et le chargea de l’éducation de ses enfants. Ils étaient dans la première jeunesse. Homère accepta ces conditions. Ce fut à Bolissus et chez ce citoyen de Chios qu’il composa les Cercopes[1], la Batrachomyomachie, les Épicichlides[2], et tous ces autres poëmes amusants qui lui acquirent une grande réputation. Thestorides n’eut pas plutôt appris qu’Homère était sur les lieux, qu’il quitta l’île de Chios.

XXV. Quelque temps après, Homère ayant prié ce citoyen de Chios de le mener à la ville de ce nom, il y établit une école où il donnait à la jeunesse des règles de poésie. Il s’en acquitta avec tant d’habileté, au jugement des habitants, que la plupart l’eurent en grande vénération. Ayant acquis par ce moyen une fortune honnête, il se maria et eut deux filles ; l’une mourut avant que d’avoir été mariée ; l’autre épousa un habitant de Chios.

XXVI. Il témoigna dans ses poëmes sa reconnaissance à ceux qui l’avaient obligé ; premièrement à Mentor d’Ithaque dans l’Odyssée, parce qu’il avait pris un soin particulier de lui pendant son mal d’yeux. Il inséra son nom dans son poëme, le mit au nombre des compagnons d’Ulysse, et raconta que ce prince, à son départ pour Troie, lui remit le soin de sa maison et de son bien, le regardant comme le plus juste et le plus homme de bien qu’il y eût à Ithaque. Homère en fait souvent une honorable mention dans quelques autres endroits de son poëme ; et lorsqu’il introduit Minerve s’entretenant avec quelqu’un, il lui donne la figure de Mentor.

  1. Suidas et Proclus mettent aussi les Cercopes au nombre des ouvrages d’Homère. Ce poëme n’est pas venu jusqu’à nous. Ces Cercopes étaient des hommes méchants, trompeurs. De là le proverbe κερκωπίζειν, qui signifie agir frauduleusement. (L.)
  2. Les Épicichlides étaient un poëme destiné à l’amusement des enfants. Comme ils prenaient un singulier plaisir à le lui entendre chanter, ils lui faisaient présent de grives, ainsi que nous l’apprenons de Ménæchmus dans un ouvrage sur les artistes. Les Grecs nommaient en leur langue une grive κίχλη. Ce poëme roulait en grande partie sur l’amour, au rapport de Cléarque dans le second livre des Érotiques. (L.)

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