Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 2, 1850.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
38
HISTOIRE D’HÉRODOTE.

à eux et aux Milésiens[1]. Elle était conçue en ces termes : « Lorsque la femelle victorieuse aura repoussé le mâle, et qu’elle se sera acquis de la gloire parmi les Argiens, alors grand nombre d’Argiennes se déchireront le visage ; de sorte qu’un jour les races futures diront : Un serpent effroyable, dont le corps faisait trois replis, a été tué à coups de pique[2]. »

Le concours de toutes ces circonstances inspirait de la frayeur aux Argiens. Ils résolurent par cette raison de régler leurs mouvements sur le héraut des ennemis. Cette résolution prise, toutes les fois que le héraut de Sparte signifiait un ordre aux Lacédémoniens, ils exécutaient de leur côté la même chose.

LXXVIII. Cléomène, ayant remarqué que les Argiens se réglaient sur le héraut de Sparte, ordonna à ses troupes de prendre les armes quand le héraut leur donnerait le signal du repos, et d’aller droit à eux. Les Lacédémoniens exécutèrent cet ordre, et fondirent sur les Argiens tandis qu’ils se reposaient, suivant le signal du héraut. Il y en eut beaucoup de tués ; mais ils se réfugièrent en beaucoup plus grand nombre dans le bois consacré à Argos, où ils furent aussitôt investis.

LXXIX. Voici de quelle manière Cléomène se conduisit après cela. Ayant appris, par des transfuges qu’il avait dans son camp, les noms de ceux qui étaient renfermés dans le lieu sacré, il envoya un héraut qui les appela cha-

  1. La première partie de cet oracle, qui concernait les Milésiens, se trouve ci dessus, § xix.
  2. Cet oracle est très-obscur, et le récit d’Hérodote n’y répand aucun jour. La première partie s’explique très-bien par ce que rapporte Pausanias : « Lorsque Cléomène mena ses troupes contre la ville d’Argos, qu’il croyait dépourvue de défenseurs, Télésilla fit monter sur les murailles les esclaves, et tous ceux qui, à cause de leur jeunesse ou de leur grand âge, ne pouvaient pas porter les armes. Elle rassembla ensuite toutes les armes qui restaient dans les maisons et dans les temples ; elle en arma toutes les femmes qui étaient à la fleur de l’âge, et les plaça dans l’endroit par où elle savait que les ennemis devaient venir. Sans être effrayées ni de l’approche des Lacédémoniens, ni de leurs cris de guerre, ces femmes reçurent leur choc avec courage ; mais les Lacédémoniens faisant réflexion que s’ils les tuaient, cette victoire ne leur ferait aucun honneur, et que s’ils étaient défaits, ce serait une tache pour eux, ils aimèrent mieux se retirer. » Quant à la seconde partie, elle est restée inintelligible. (L.)