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ÉRATO, LIVRE VI.

demment de l’attaquer la première. Les Naxiens s’enfuirent dans les montagnes, sans les attendre ; les Perses mirent le feu aux temples et à la ville ; et, après avoir réduit en esclavage tous ceux qui tombèrent entre leurs mains, ils se remirent en mer pour aller aux autres îles.

XCVII. Sur ces entrefaites, les Déliens s’enfuirent aussi de leur île, et se réfugièrent à Ténos. Les Perses prirent la route de Délos ; mais Datis, dont le vaisseau devançait la flotte, leur défendit d’y aborder, et leur ordonna de se rendre à l’île de Rhénée, qui est au delà. Quand il eut appris le lieu de la retraite des Déliens, il leur envoya un héraut, qui leur parla ainsi en son nom : « Hommes sacrés, pourquoi fuyez-vous ? Pourquoi concevoir de moi une opinion peu favorable ? Je suis naturellement porté à épargner le pays qui a vu naître Apollon et Diane, et à ne faire aucun mal à ses habitants ; et d’ailleurs j’en ai reçu l’ordre du roi. Retournez donc dans vos maisons, et cultivez vos terres en paix. » Tel est le discours que tint de sa part le héraut aux Déliens. Il fit ensuite brûler trois cents talents[1] d’encens qu’il avait fait entasser sur l’autel.

XCVIII. Cela fait, Datis s’avança d’abord avec l’armée navale vers Érétrie, accompagné des Ioniens et des Éoliens. Quand il fut parti de Délos, on y éprouva un tremblement de terre, à ce que disent les Déliens ; et jusqu’à mon temps c’est la seule fois que cette île en ait jamais essuyé. Mais le dieu voulut par ce prodige faire connaître aux hommes les maux qui allaient fondre sur eux ; car la Grèce en éprouva plus sous les trois règnes consécutifs de Darius fils d’Hystaspes, de Xerxès fils de Darius, et d’Artaxerxès fils de Xerxès, que pendant les vingt générations qui ont précédé le premier de ces princes. Ces maux lui sont venus en partie des Perses, et en partie des plus puissants de ses peuples[2] qui se sont disputé, les armes à la main, le commandement sur le reste du pays. Il

  1. Le talent attique pesait 51 livres 6 onces 7 gros 24 grains. Ainsi les 300 talents équivalent à 15 429 livres 7 onces 2 gros 48 grains. (L.)
  2. Il veut parler de la guerre du Péloponnèse, dont il a vu le commencement. (L.)