Page:Hérodote - Histoire.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

testait, parce que cet historien avait dit de ses compatriotes des vérités qui n’étaient pas à leur avantage. Il prétend, il est vrai, que les Corinthiens se comportèrent vaillamment à la journée de Salamine, et qu’Hérodote a supprimé leurs louanges par malignité. Cependant, loin de les supprimer, il a rapporté ce que les Grecs racontaient de plus flatteur pour ce peuple ; mais, comme il faisait profession d’impartialité, il n’a pas cru devoir passer sous silence ce qu’en disaient aussi les Athéniens. Ce serait ici le lieu de réfuter ce qu’avance Plutarque pour prouver que les Corinthiens se couvrirent de gloire à cette bataille ; mais comme cela me mènerait trop loin, et que vraisemblablement très-peu de lecteurs prendraient intérêt à cette discussion, je crois devoir d’autant moins l’entreprendre que cette digression n’est peut-être déjà que trop longue.

Douze ans après avoir lu une partie de son Histoire aux jeux Olympiques, Hérodote en lut une autre à Athènes, à la fête des Panathénées, qu’on célébrait le 28 hécatombœon, qui revient au 10 août. Cette lecture eut donc lieu l’an 4270 de la période julienne, 444 ans avant notre ère, et la première année de la LXXXIV° olympiade. Les Athéniens ne se bornèrent pas à des louanges stériles : ils lui firent présent de dix talents, par un décret proposé par Anytus et ratifié par le peuple assemblé, comme l’atteste Diyllus, historien très-estimé. C’est sans doute de cette récompense qu’il faut entendre ce que dit Eusèbe, à l’endroit que je viens de citer, qu’Hérodote fut honoré par les Athéniens.

Il semble que cet accueil aurait dû le fixer à Athènes. Cependant il se joignit à la colonie que les Athéniens envoyèrent à Thurium au commencement de l’olympiade suivante. Le goût qu’il avait pour les voyages l’emporta peut-être sur la reconnaissance qu’il devait aux Athéniens ; mais peut-être aussi ne crut-il pas quitter Athènes en accompagnant un si grand nombre d’Athéniens, parmi lesquels il y en avait de très-distingués. Lysias, âgé seulement de quinze ans, qui devint dans la suite un très-grand orateur, était du nombre des colons. Hérodote avait alors quarante ans ; car il était né l’an 484 avant notre ère, et la première année de la LXXIV° olympiade. L’auteur anonyme de la Vie de Thucydide met aussi cet historien au nombre des colons. Mais comme il est le seul écrivain qui en fasse mention, il est permis d’en douter.

Il fixa sa demeure à Thurium ; ou, s’il en sortit, ce ne fut que pour faire quelques excursions dans la Grande-Grèce, je veux dire dans cette partie de l’Italie qui était peuplée par des colonies grecques, et qui fut ainsi nommée, non parce qu’elle était plus considérable que le reste de la Grèce, mais parce que Pythagore et les pythagoriciens lui acquirent une grande célébrité. Il y a beaucoup d’apparence qu’il passa le reste de ses jours dans cette ville, et il parait certain que ce fut par cette raison qu’on lui donna quelquefois le surnom d’Hérodote de Thurium. Strabon le dit positivement. Voici