Page:Hérodote - Histoire.djvu/62

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car toutes les filles, dans le pays des Lydiens, se livrent à la prostitution : elles y gagnent leur dot, et continuent ce commerce jusqu’à ce qu’elles se marient. Elles ont le droit de choisir leurs époux. Ce monument a six stades deux plèthres de tour, et treize plèthres de largeur. Tout auprès est un grand lac qui ne tarit jamais, à ce que disent les Lydiens. On l’appelle le lac Gygée. Assez sur ce sujet.

XCIV. Les lois des Lydiens ressemblent beaucoup à celles des Grecs, excepté dans ce qui regarde la prostitution des filles. De tous les peuples que nous connaissons, ce sont les premiers qui aient frappé, pour leur usage, des monnaies d’or et d’argent, et les premiers aussi qui aient fait le métier de revendeur. A les en croire, ils sont les inventeurs des différents jeux actuellement en usage tant chez eux que chez les grecs ; ils envoyèrent une colonie dans la Tyrrhénie. Voici comment ils racontent ce fait. Sous le règne d’Atys, fils de Manès, toute la Lydie fut affligée d’une grande famine, que les Lydiens supportèrent quelque temps avec patience. Mais, voyant que le mal ne cessait point, ils y cherchèrent remède, et chacun en imagina à sa manière. Ce fut à cette occasion qu’ils inventèrent les dés, les osselets, la balle, et toutes les autres sortes de jeux, excepté les dames, dont ils ne s’attribuent pas la découverte. Or, voici l’usage qu’ils firent de cette invention pour tromper la faim qui les pressait. On jouait alternativement pendant un jour entier, afin de se distraire du besoin de manger ; et, le jour suivant, on mangeait au lieu de jouer. Ils menèrent cette vie pendant dix-huit ans ; mais enfin, le mal, au lieu de diminuer, prenant de nouvelles forces, le roi partagea tous les Lydiens en deux classes, et les fit tirer au sort, l’une pour rester, l’autre pour quitter le pays. Celle que le sort destinait à rester eut pour chef le roi même, et son fils Tyrrhénus se mit à la tête des émigrants.

Les Lydiens que le sort bannissait de leur patrie allèrent d’abord à Smyrne, où ils construisirent des vaisseaux, les chargèrent de tout ce qui leur était nécessaire, et s’embarquèrent pour aller chercher des vivres et d’autres terres. Après avoir côtoyé différents pays, ils abordèrent en Ombrie, où ils bâtirent des villes, qu’ils habitent encore à présent ; mais ils quittèrent le nom de Lydiens, et prirent celui de Tyrrhéniens,