aubaines qu’on trouve sans les chercher : ce qu’il veut obtenir du dieu secourable, ce sont plutôt des expédients, des occasions propices. Son inspiration lui vient d’Hermès comme elle vient à d’autres d’Apollon.
Et pourtant, malgré son cynisme, ses propos orduriers et peut-être ses vilenies, Hipponax nous reste sympathique parce qu’il sait nous apitoyer. On sait qu’il fut pauvre et disgracié de la nature : d’après la légende, il était petit, maigre et contrefait : les sculpteurs Boupalos et Athénis se moquaient de sa laideur et le représentaient en caricature. Il est bien naturel que toutes ces misères l’aient profondément aigri et l’aient porté vers la satire : s’il faut, pour réussir dans ce genre, connaître la vie et voir de près ses réalités, Hipponax possède cette expérience mieux que tout autre. Exilé d’Éphèse, il vit misérablement en Grèce, souffrant à la fois de sa misère et de sa difformité ; il lutte contre la mauvaise fortune et contre les hommes, il a pour armes ses poings non moins que ses vers. Villon et Régnier semblent des raffinés auprès de lui : s’ils aiment la canaille et se plaisent avec elle, c’est surtout par dépravation, on dirait presque par dilettantisme. Combien plus pitoyable est cette silhouette du poète contrefait, traînant dans les ruisseaux de Clazomène ses chaussures trouées et sa tunique en lambeaux !