Page:Hérondas - Mimes, trad. Dalmeyda, 1893.djvu/42

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est jalouse, sans doute, mais elle est encore plus amoureuse et sensuelle. Cette sensualité se montre partout, même dans ses raffinements de cruauté. Sincèrement ou non, elle joue une sorte de comédie qu’elle doit répéter souvent et qui ne trompe pas son entourage ; l’esclave chargé de lier et d’emmener le coupable se fait répéter l’ordre plusieurs fois, ce n’est pas à coup sûr par pitié, c’est surtout par précaution et sans doute aussi par expérience : quand il pensera que sa maîtresse est sérieusement décidée à punir, il ne se fera pas faute de malmener son compagnon. Je serais aussi tenté de n’avoir pas plus de confiance dans la bonté d’âme de la servante Kudilla : quand elle se jette aux pieds de Bitinna, quand elle la supplie de faire grâce au nom de sa chère Batullis, elle doit savoir que ses prières ne causent aucun déplaisir à sa maîtresse : celle-ci veut se borner à des menaces et doit se réjouir qu’on lui épargne une faiblesse, qu’on l’empêche de s’humilier à ses propres yeux. Au reste, par sa situation assez exceptionnelle, Gastron doit être moins aimé que redouté de ses compagnons, et nous avons pu voir d’autre part que l’auteur des mimes nous offre rarement des scènes sentimentales. C’est un pur réaliste qui n’adoucit jamais ses tableaux : dans le morceau que nous venons d’analyser, la mise en œuvre est encore plus hardie que le sujet lui-