Page:Höffding - Histoire de la philosophie moderne.djvu/132

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dons aucun point de repère qui puisse prouver que toutes les étoiles ont pris, par rapport à la terre, exactement la même position que celle qu’elles avaient auparavant, et que leurs mouvements soient absolument réguliers. Le mouvement ayant un aspect différent, vu des différentes étoiles, il y aura, s’il est employé à mesurer le temps, autant de temps dans l’univers qu’il y a d’étoiles.

Les notions de pesanteur et de légèreté ne sauraient, non plus que les déterminations de lieu, avoir une signification absolue. Pour Aristote, la pesanteur était la tendance à rechercher le centre du monde, et la terre étant l’élément le plus pesant, devait nécessairement être au centre du monde ! Mais les qualités de pesanteur et de légèreté reviennent de droit aux parties de tout corps céleste pris en particulier par rapport au corps céleste tout entier. Si un corps pesant tombe, cela vient de ce qu’il recherche le lieu où il y a son foyer, où il peut le mieux demeurer. Les molécules du soleil sont pesantes par rapport à lui, de même que les molécules de la terre par rapport à la terre. Par rapport à l’univers en tant que totalité, les notions de pesanteur et de légèreté ne sont pas plus valables que les déterminations de temps et de lieu et que les mouvements. Ce n’est que par rapport à un corps céleste déterminé ou à un système déterminé qu’elles acquièrent un sens. — C’est la même théorie de la pesanteur que celle que nous avons déjà trouvée chez Copernic, à cela près que Bruno attache une importance capitale au fait que ces parties recherchent leur tout en vertu d’une tendance à se conserver. Copernic s’appuyait également sur la relativité de nos définitions ; mais il faisait halte à mi-chemin. C’est le mérite de Bruno que d’avoir développé ce principe et d’avoir montré quelles conséquences il implique. Nous trouvons aussi chez Bruno pour la première fois une réponse définitive à l’une des objections principales faites à Copernic, que des objets qui tombent sur la terre devraient nécessairement la toucher non pas exactement en ligne verticale, mais un peu plus à l’ouest. Bruno démontre qu’une pierre jetée du haut d’un mât tombera au pied de ce mât parce que dès le début en vertu de la force imprimée (virtu impressa) elle participe au