Page:Höffding - Histoire de la philosophie moderne.djvu/191

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Toute une série de modifications du ciel perdaient ainsi leur caractère absolu et ne s’expliquaient plus que par le lieu où se tenait le spectateur ; de même Galilée trouva l’occasion, en ce qui concerne les phénomènes terrestres, de transporter les différences du domaine objectif au domaine subjectif. Nous avons déjà vu qu’il contestait la transformation des substances et ne voulait admettre de changement que dans la disposition des parties ; à vrai dire, c’était donner du même coup le principe de la subjectivité des qualités sensibles. Mais Galilée a exprimé ce principe sous une forme encore plus catégorique. Dans un remarquable chapitre d’un ouvrage polémique d’astronomie (Il saggiatore, 1623), il déclarait que les seules qualités que nous devions nécessairement attribuer aux choses, sont figure, grandeur et mouvement ou repos. Ces qualités, que pour cette raison il appelle qualités premières et réelles (primi e reali accidenti), aucun effort de notre imagination, si grand soit-il, ne peut les séparer des choses. C’est au contraire à un préjugé entretenu par les sens que nous devons de regarder le goût, l’odeur, la couleur, la chaleur, etc., comme des qualités absolues des choses. Ce ne sont que des noms que nous donnons aux choses lorsqu’elles provoquent en nous certaines sensations. En fait, elles n’ont pas leur siège dans les choses, mais dans le corps sensible (nel corpo sensitivo). Qu’on supprime l’être sensible — et toutes ces qualités disparaîtront aussitôt37 ! — Le parallélisme de cette observation avec l’ordre d’idées employé pour défendre le nouveau système du monde est facile à voir. Il prit une grande importance pour la théorie moderne de la connaissance, dès que celle-ci put se dégager entièrement des liens du dogmatisme.

5. — François Bacon de Verulam

a) Devanciers.

La science nouvelle fondée sous le coup des expériences et des inventions de la vie pratique, devait amener un agrandissement de la logique traditionnelle. Chez ceux-là mêmes qui ne subissaient pas directement l’influence provoquée par la