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centres, de nouvelles monades. Ici, il tranche la difficulté. Peut-être le nœud de la difficulté contenue dans le problème de l’individualité ne se laisse-t-il pas défaire par notre pensée ; le trancher, en tous cas, ce n’est pas le dénouer.

Mais cette violence n’est — ainsi que la réserve faite à l’endroit de Spinoza — qu’une conséquence de l’énergie avec laquelle Leibniz a approfondi la notion d’individualité. Elle se présente chez lui avec un éclat et une clarté que l’on ne trouve chez aucun autre penseur. Et la tournure originale qu’il donna à la notion de substance en l’appliquant aux éléments individuels de l’existence (les monades), est caractéristique de la transition du xviie au xviiie siècle. La recherche libre et originale de la clarté, le besoin de développer son être propre prend alors dans l’individu la place de la résignation mystique et de la soumission aux puissances absolues. C’est là une révolution dans le monde de la pensée — un prélude de la révolution dans le monde extérieur. Cependant le système de Leibniz a un postulat commun avec les autres grands systèmes, le postulat de la rationalité parfaite de l’existence. Le principe de la raison suffisante est pour lui le principe directeur, dans sa spéculation théologique et dans la théorie des monades comme dans ses ouvrages sur les mathématiques et la science de la nature. Cette conception passa aussi au siècle nouveau, dont il fut l’initiateur typique.

c) Psychologie et théorie de la connaissance.

Il ressort de la signification qu’a pour Leibniz l’analogie avec la vie de la conscience comme fondement de son idéalisme métaphysique, que son point de départ proprement dit doit être le même que celui de Descartes : l’observation directe du moi, l’expérience interne. Elle nous donne le premier terme de l’analogie. Leibniz voit clairement qu’il y a là un point de départ de sa pensée, et il lui a consacré une grande attention. Les Nouveaux Essais sont ici l’ouvrage principal. On ne peut guère apprécier le côté polémique de cet ouvrage avant d’avoir exposé la théorie de la connaissance de Locke contre laquelle il était dirigé. Dans cet ordre d’idées, ce qu’il y a de plus important, ce sont toutefois les vues propres à Leibniz sur la