pour lui le problème à résoudre. Mais il le traite de façon telle qu’il émet en passant des pensées offrant un haut intérêt sur la théorie de la connaissance et sur les sciences naturelles. Sa tendance mystique implique absolument la suppression de toute séparation nette entre les domaines de l’entendement. Les obscurités et les passages abstrus que l’on rencontre dans ses écrits, à côté d’une foule d’idées excellentes, tiennent à cette confusion. — Nous n’avons aucun intérêt à parcourir toute sa philosophie. Il importe seulement de montrer qu’il découvrit des pensées qui ébranlèrent le système du monde étayé sur le témoignage des sens, sur l’observation des anciens et sur l’autorité de l’Église.
De Cusa conçoit la connaissance comme faculté active de combinaison et d’assimilation. Les sens reçoivent les sensations dispersées ; mais ici déjà se manifeste la pensée, car d’une part les sensations séparées sont assemblées en un tout, et d’autre part il se produit un étonnement qui invite à continuer. Les diverses images sensibles sont combinées par l’imagination (phantasia), les divers ensembles d’images sont combinés par la raison (ratio), mais à tous ces degrés agit la pensée (intelligentia) qui cherche à ramener finalement toutes les diversités à l’unité absolue. Mais ici apparaît la difficulté, car sans pluralité et sans différence (alteritas) notre pensée ne peut pas connaître. La pensée trouve donc sa limite juste à son sommet. Elle ne peut qu’approcher de l’unité absolue, au moyen d’une intuition mystique où tous les rayons de l’être convergent en un seul centre, et qui remplace le processus de la connaissance et procure le repos à la pensée. La perfection de la pensée en est donc aussi la cessation.
Cette conception de la connaissance (développée dans l’ouvrage De conjecturis, chap. xvi) précise ce que de Cusa entend par « ignorance consciente » (docta ignorantia), expression qui se trouve déjà chez Bonaventure. Il veut dire par là la conscience qu’a la pensée de ses propres limites, unie à l’hypothèse mystique que la souveraine bonté et l’idéal sont au delà de ces limites, tout en continuant la démarche qui a amené jusqu’à la frontière. Voici comment ceci est traité dans l’ouvrage intitulé De docta ignorantia : notre connaissance cherche