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Page:Haeckel - Religion et Évolution, trad. Bos, 1907.djvu/140

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et le succès le plus vifs, dans tous les milieux où la pensée est libre et où l’on a soif de vérité, — d’autre part, en revanche, la désapprobation et les soupçons, dans les milieux berlinois orthodoxes et conservateurs et dans l’entourage de la cour ; le général de Witzlehen avait représenté au roi de Prusse combien ces doctrines « ennemies de la foi » menaçaient la puissance de la « religion » sans laquelle l’État ne pouvait subsister ! Néanmoins, Humboldt était trop considéré par la cour de Prusse (qui, elle-même assistait aux conférences du savant et marquait son approbation) pour être sérieusement menacé par ces dénonciations. S’il vivait encore aujourd’hui et s’il se risquait à enseigner, comme une conséquence naturelle de son Cosmos, la théorie de la descendance et de l’anthropogénie, il aurait, à la cour actuelle, une situation difficile ! D’ailleurs je conseille aux pieux soutiens du trône et de l’autel, qui se plaignent aujourd’hui amèrement de la « profanation de la Sing-Akademie », de remédier au mal de remédier au mal par les procédés de la désinfection moderne, ainsi que le pape, en septembre 1904, a fait désinfecter les saintes églises de Rome, « profanées » par le Congrès de la libre-pensée. Je ne crois pas en tous cas que le bacille de la vérité, si redouté et si haï, puisse être détruit par ces fumigations de formol, pas plus que par les déclamations des prédicateurs de la cour berlinoise, qui se lamentent sur les théories destructives de l’évolution et de la descendance du singe !

14. La religion et l’idée d’évolution (p. 111). — À l’occasion de ces mêmes conférences de Berlin, on m’a adressé de nouveau, dans les journaux orthodoxes et conservateurs, avec une violence particulière, le vieux reproche que l’idée d’évolution détruisait la religion et avec elle les bases d’un état organisé et jusqu’à la civilisation tout entière. Ce grave reproche n’est justifié que si l’on entend par « religion » la superstition traditionnelle, la conception anthropomorphiste d’un « Dieu personnel » défini, la prétention égoïste à une bienheureuse « vie éternelle » et la croyance erronée que l’humanité et la moralité véritables ne sont possibles que fondées sur ces imaginations mystiques. Je crois fermement, au contraire, à cette idée rationnelle que notre religion moniste, fondée sur la con-