Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/313

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à quelques rapprochements que nous devions être conduits tout à l’heure, il est certain que la nature, au sens technique où Aristote l’entend, n’est pas plus le principe moteur d’un être organisé qu’elle n’est un pouvoir sans siège défini.

Mais ce n’est pas tout que d’écarter ces incertitudes et ces obscurités un peu extérieures. Il y a autre chose à faire, et Aristote nous fournit d’autres précisions pour déterminer l’idée de nature. « La nature, dit Aristote, est un principe et une cause de mouvement et de repos pour la chose en quoi elle réside immédiatement et à titre d’attribut essentiel, et non pas accidentel, de cette chose[1] ». Un premier éclaircissement de cette définition va résulter pour nous d’un commentaire quasi littéral de ses divers éléments. — Tout d’abord, comment la nature est-elle un principe de repos en même temps que de mouvement ? La nature n’est quelquefois qu’un principe de mouvement : il y a en effet un élément, l’éther, qui circule sans cesse en vertu de sa nature. Lors donc qu’Aristote écrit que la nature est un principe de mouvement et de repos, il faut entendre : de mouvement ou de repos. Mais peu importe. Ce qui demande explication, c’est que le repos ait, aux yeux d’Aristote, besoin d’un principe. Ce n’est pas parce qu’il considère le repos comme un état d’équilibre entre des forces opposées. C’est pourtant parce que le repos participe en quelque façon du mouvement. Il ne faut pas confondre en effet le repos avec une immobilité quelconque. Ce qui n’est pas susceptible de mouvement est immobile, mais n’est pas en repos. Le repos est l’immobilité de ce qui pourrait être mû. Le repos est donc postérieur au mouvement[2]. En un mot il est la privation du mouvement, et, comme toute privation, il n’est pas une pure négation, mais une négation déterminée. C’est pourquoi le repos ne peut s’expliquer que par une certaine intervention du principe du

  1. Phys. II, 1, 192 b, 20 : … οὔσης τῆς φύσεως ἀρχῆς τινὸς καὶ αἰτίας τοῦ κινεῖσθαι καὶ ἠρεμεῖν ἐν ᾧ ὑπάρχει πρώτως καθ’ αὑτὸ καὶ μὴ κατὰ συμβεβηκός. Cf. Zeller, p. 386, n. 6.
  2. Ibid. III, 2, 202 a, 4 : ᾧ γὰρ ἡ κίνησις ὑπάρχει, τούτου ἡ ἀκινησία ἠρεμία. VIII, 9, 265 a, 27 : … ἡ δὲ στάσις ἐφθαρμένη κίνησις.