Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/337

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a aussi des choses toujours en mouvement et des choses toujours en repos, ou plutôt toujours immobiles[1] (254 a, 15 à la fin du chap.).

Jusqu’ici Aristote n’a fait que poser les préliminaires de la démonstration du premier moteur. À présent il va entamer cette démonstration proprement dite. Le premier point qu’il va établir, c’est que toute chose mue l’est par quelque chose, c’est-à-dire qu’il faut distinguer, de quelque façon que la distinction doive se préciser plus tard, entre le moteur et le mû. Laissant de côté les choses mues par accident, considérons les choses qui sont réellement le sujet d’un mouvement. Ces choses peuvent se diviser, d’une part, en choses mues par elles-mêmes et choses mues par autre chose ; d’autre part, en choses mues par nature et choses mues d’un mouvement forcé ou contraire à la nature. — Mais il est à la fois urgent et délicat d’établir des rapports exacts entre ces deux classifications. Dire qu’une chose est mue par elle-même et qu’elle est mue par nature, cela semble ne faire qu’un, puisque la nature est un principe interne de mouvement. À leur tour, les choses qui sont mues par autre chose coïncident aisément avec les choses mues contre nature, puisque le moteur qui meut un mobile contrairement à la nature de ce mobile est, par définition, extérieur à lui. Cependant tout ce qui est mû par nature n’est pas mû par soi. Sans doute tout ce qui est mû par soi (ὑφ’ ἑαυτοῦ) est mû par nature. Ainsi, bien que parfois certaines parties des animaux soient mues contrairement à la nature, comme lorsque des parties terreuses de l’animal sont portées vers le haut au moyen

  1. μᾶλλον δὲ ἀκίνητά ἐστιν ἀεί, dit Thémistius, dans sa paraphrase de la Phys. 420, 17 Sp. Il est hautement probable que c’est par négligence qu’Aristote a écrit ici (254 b, 3) : τὰ δ’ ἠρεμεῖν ἀεί. Au début du ch. (253 a, 29), il avait écrit : τὰ μὲν ἀεὶ… ἀκίνητα εἶναι. Au surplus tout l’ensemble du livre VIII nous oblige à croire qu’il s’agit dans sa pensée du moteur immobile, et non pas de la terre, toujours en repos au centre du monde. Car quel intérêt majeur y aurait-il à appeler si fortement l’attention sur elle ? Le repos de la terre ne joue aucun rôle dans la démonstration du principe premier du mouvement. Le rôle le plus inférieur est joué par la sphère de la lune, représentant le mû qui ne meut plus rien.