Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/389

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’une fonction susceptible d’être placée sur le même pied que les deux précédentes. Nous considérerons donc la classification d’Aristote comme bipartite, et nous parlerons d’abord de la pensée ensuite de la production du mouvement.

La pensée offre plusieurs degrés hiérarchiques, dont le plus inférieur est la sensation. Qu’est-ce que la sensation ? La formule connue, qu’elle est l’acte commun de la sensibilité et du sensible, ou mieux que l’acte de la sensibilité et du sensible est un seul et même acte, est, ou peu s’en faut, une définition de la sensation. Seulement il importe de bien comprendre cette formule. Le sensible se prend en plusieurs sens. Il y a d’une part les sensibles propres, tels que la couleur et le son, et, de l’autre, les sensibles communs : mouvement, repos, nombre, figure, grandeur ; il y a même les sensibles par accident, par exemple que cette chose blanche est le fils de Diarès. Précisément parce qu’ils n’ont rien de commun avec autre chose, les sensibles propres sont toujours sentis sans erreur, tandis que l’erreur est possible sur les sensibles communs, et surtout sur les sensibles par accident (De an. II, 6). Dans la définition de la sensation, c’est, bien entendu, le sensible propre qui est principalement pris en considération. À cette distinction dans les sensibles répondent des distinctions dans la sensibilité. Il y a, notamment, d’un côté des sens spéciaux, la vue, l’ouïe, etc. et un sens commun, fond indifférencié de la sensibilité. Pour définir la sensation c’est surtout aux sens spéciaux qu’il faut songer. Mais ce qu’il importe au plus haut point et ce qu’il est le moins facile de comprendre, c’est la signification exacte des mots acte commun, ou acte unique de la sensibilité et du sensible. Il va de soi que cela ne signifie pas une coopération quelconque des deux termes dans une œuvre vaguement indiquée. Les mots doivent être pris dans leur sens précis et technique. Cela est d’ailleurs loin de suffire ; car il reste à savoir comment l’acte des deux termes est commun, si c’est parce que l’un d’eux, la sensibilité sans doute, n’a pas de nature propre et n’est qu’un accident du sensible ; ou si les deux termes sont bien réels l’un et l’autre et aboutissent, chacun par un