Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/408

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tères qui entrent dans une définition n’ont pas toujours de l’extension, ils sont seulement susceptibles d’en recevoir ἐπ’ ἄλλου ἐνδέχεται[1]. Cette universalité de droit est assez différente de l’universalité de fait. Si elle suffit, on peut donc en réalité penser un concept sans extension. C’est si bien là au fond l’opinion d’Aristote que, comme nous l’avons aussi indiqué, Alexandre assigne pour objet à la définition l’ensemble des caractères qui constituent la compréhension d’un concept, sans qu’on ait à se demander si ce concept est ou non répété en plusieurs exemplaires[2]. D’ailleurs l’acte essentiel de la connaissance n’est pas, nous le savons (p. 116 sqq.), le λόγος ou la discursion, c’est l’intuition. Or, si l’extension est naturellement afférente au λόγος, non moins naturellement l’intuition est un acte singulier. La preuve en est dans le rapprochement qu’Aristote établit entre l’intellection et la sensation. D’une part, il se sert de l’exemple de la sensation pour faire comprendre l’intellection des indivisibles ; de l’autre, il déclare que la sensation qui saisit l’homme dans Callias et la sensation des gens expérimentés qui savent voir sont intellection[3]. Lors

  1. Une partie de ce texte a été citée p. 126, n. 4 ; cf. Bonitz, Metaph. II, p. 356. L’Idée platonicienne est un véritable individu et, pour cette raison, ne peut être définie : voir en particulier Métaph. Μ, 9, 1086 a, 32-35 et Ζ, 15, 1040 a, 8-14 ; b, 2 sq.
  2. Alexandre, Ἀπορίαι καὶ λύσεις, I, 11 b, 23, 23-32 Bruns (cf. supra, p. 126). Voir Rodier, op. cit., II, p. 19.
  3. Voir p. 116, n. 2. Cf., en outre des textes cités à cet endroit, De an. III, 4, 429 a, 13 : εἰ δή ἐστι τὸ νοεῖν ὥσπερ τὸ αἰσθάνεσθαι, ἢ πάσχειν [cf. Rodier, p. 436] τι ὑπὸ τοῦ νοητοῦ ἤ τι τοιοῦτον ἕτερον… [cf. p. 385, n. 3] ὁμοίως ἔχειν, ὥσπερ τὸ αἰσθητικὸν πρὸς τὰ αἰσθητά, οὕτω τὸν νοῦν πρὸς τὰ νοητά. 8, 432 a, 2 : … ὁ νοῦς εἶδος εἰδῶν καὶ ἡ αἴσθησις εἶδος αἰσθητῶν [cf. p. 379, n. 1]. C’est à l’aide de métaphores empruntées au contact et à la vision qu’Aristote décrit l’intellection, Métaph. Θ, 10, 1052 a, 3 : ni l’erreur, qui est le fait d’une synthèse incorrecte, ni l’ignorance ne sont comparables à la cécité, ἡ μὲν γὰρ τυφλότης ἐστὶν ὡς ἂν εἰ τὸ νοητικὸν ὅλως μὴ ἔχοι τις. Λ, 7, 1072 b, 20 : l’intellect se pense lui-même κατὰ μετάληψιν τοῦ νοητοῦ… θιγγάνων καὶ νοῶν… τὸ γὰρ δεκτικὸν τοῦ νοητοῦ καὶ τῆς οὐσίας νοῦς. Éth. Nic. I, 4 (6), 1096 b, 28 : ὡς γὰρ ἐν σώματι ὄψις, ἐν ψυχῇ νοῦς… et de même Top. I, 17, 108 a, 11. — Sur le rapport de l’intellection et des intuitions de l’expérience, cf. Éth. Nic. VI, 12 (11), 1143 b, 4, 11 : ἐκ τῶν καθ’ ἕκαστα