Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/58

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mêmes, quoique contenant à leur façon un moi et un non-moi, un moi et un non-moi infiniment petits ? Pour qu’on dût prêter à M. Renouvier une doctrine si contraire non seulement au personnalisme de la fin de sa vie, mais même à la désignation qu’il a toujours appliquée à la catégorie suprême, laquelle s’appelle chez lui loi de personnalité, il faudrait que toute autre interprétation fût impossible. Or il y a une autre interprétation possible et la voici. Un moi est tout autre chose qu’une collection de phénomènes dont chacun aurait comme l’un de ses pôles un moi élémentaire ; un moi est une synthèse de phénomènes, une loi qui domine les phénomènes. Mais cette synthèse, cette loi dominante est elle-même un phénomène, elle est représentée, elle n’existe que comme représentée à elle-même : autrement dit, tout représentatif est un représenté pour lui-même. Voilà comment il n’y a pas de moi qui soit en dehors de la représentation, qui soit autre chose et plus que la représentation. D’autre part (c’est le second point de la véritable pensée de M. Renouvier sur la question), il peut y avoir une pluralité de moi dans toute représentation : il faut un moi, mais s’il n’y a que des moi individuels, il suffit pour qu’il y ait représentation que l’un quelconque de ces moi individuels s’oppose à des représentés : aucun d’entre eux n’a de privilège et n’est plus qualifié qu’un autre pour jouer le rôle de représentatif dans une série liée de représentations. Nous retrouverons plus d’une fois ce dernier point en étudiant la pensée de M. Renouvier, et nous ne voudrions pas dire qu’il ne donne pas lieu à des difficultés lorsque notamment il s’agit d’établir la possibilité d’une communication ou harmonie entre ces moi divers. Mais ce n’est pas la question pour le moment. Ce dont il faut présentement se rendre compte, c’est que, quand M. Renouvier dit que les divers moi n’existent que dans la représentation, cela ne signifie pas qu’ils existent dans une représentation effective et pourtant générale, c’est-à-dire dans une représentation qui les envelopperait tous en commun sans être aucun d’eux. Non : ils existent chacun dans sa propre représentation, et tous dans la représentation de l’un d’entre eux. Le moi en général est le nom d’un moi individuel quelconque, ce n’est pas celui d’une essence commune. Pour M. Renouvier,