Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/119

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leur finesse asiatique, tous deux avaient l’intuition que cet étranger apportait à leur caste la servitude ; ils l’estimaient trop dangereux pour prendre parti contre lui, trop puissant pour le laisser grandir ; mais ils n’osaient rien tenter ouvertement ; fidèles à leur apathie de race, ils se fiaient au temps et à la perfidie.

L’hostilité, que les nabahs masquaient sous l’adulation, paralysait momentanément l’activité de DupIeix. Le but de celui-ci, c’était de commander à l’Inde par la bouche d’un prince indigène, devenu notre vassal, d’allié qu’il était. Or, aussi longtemps que Nizam el Molouck et Anaverdikan seraient sur le trône, ils ne solliciteraient pas notre appui. Leur déclarer la guerre et tenter la conquête de l’Inde avec les faibles effectifs des troupes de la Compagnie, c’eût été folie. L’œuvre de Dupleix n’était point de celles qui se font uniquement par la force ; la diplomatie y avait sa part. La seule politique à suivre, c’était de susciter ou d’attendre quelque révolution dans le palais d’Hyderabad et de soutenir énergiquement le prétendant qui se révélerait. Dupleix, qui savait que ces crises étaient fréquentes dans la péninsule, où elles éclataient à l’improviste, ne voulait pas être pris au dépourvu. Il maintenait sur le pied de guerre sa petite armée, forte de deux mille Européens environ et de trois à quatre mille cipayes. Ayant des troupes victorieuses, une artillerie très-bonne, un matériel solide, il guettait, plein d’espoir et d’impatience, l’occasion.

L’attente ne fut pas longue. Au début de l’année 1749, il reçut une lettre écrite du pays des Mahrattes par Chanda-Saïb, le dernier représentant de la famille