Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/171

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selon les vicissitudes du combat. Il sait communiquer aux troupes la flamme qui le dévore. Pour mener une charge, il n’a pas son pareil. Et comme il sait, sur le champ de bataille, reconnaître le point faible de l’ennemi ! Il n’a pas seulement le coup d’œil du tacticien, il a aussi la profondeur de calcul du stratège. Avec cela, une allure toute de vivacité et de résolution, de la bonhomie, de la franchise, une gaieté communicative, qui le rend séduisant au plus haut point. Et par-dessus tout cette dignité naturelle, ce je ne sais quoi de haute race et d’altier, qui impose, tout en s’alliant merveilleusement à la grâce des manières.

Il montre un grand amour de l’étude ; il connaît à fond l’histoire, les mœurs et la langue de l’Inde. Avec cela, c’est un Athénien qui aime le luxe et l’élégance, et tient en horreur le pédantisme et la morgue. Mais la profonde originalité de ce caractère, c’est le don qui est comme le secret de sa force et l’explication de son rôle : ce soldat est un homme d’État. Il en a la promptitude de décision, la clarté de conception, avec cela le tact, la finesse du diplomate, le sens d’organisation de l’administrateur. Sa qualité dominante, c’est le bon sens. Il préfère le solide à l’éclat ; sa prudence refrène souvent la fougue d’action de Dupleix.

C’est cet instinct de modération qui l’amènera plus tard à ressentir les atteintes du découragement, quand il jugera que Dupleix embrasse trop pour ses forces et pour ses moyens. Il aura alors besoin d’être soutenu, raffermi, sinon il trébuchera ; puisqu’il ne voit plus où l’on va, il sera tenté de s’arrêter et de faire des remontrances. Mais qu’à ce moment-là viennent des ordres