des prisonniers que Méhémet-Ali-Kan traînait derrière lui. Or, nous ne pouvions rien faire sans des secours étrangers ; au fond, nous étions faibles. La Compagnie n’avait jamais eu plus de mille hommes sous les armes. Si par miracle, dans l’avenir, on atteignait ce chiffre, on ne le dépasserait pas. Que faire avec un si petit nombre de soldats ? Rien qu’en se serrant autour d’eux, les Indiens les étoufferaient du poids de leur multitude. Mais c’était encore une hypothèse, dont il n’y avait pas lieu de s’occuper, puisqu’il n’était pas seulement possible de songer à tenir la campagne, puisqu’on ne pouvait même pas garnir de défenseurs trois des bastions de Pondichéry.
Une poignée de Français allait donc rester seule devant les peuples de l’Inde, soutenus par les Anglais. L’issue d’une telle lutte n’était pas douteuse. On serait vite jeté à la mer. Au contraire, en cédant au temps, à la nécessité, en faisant la part du feu, en abandonnant des conquêtes impossibles à garder à cause de leur éloignement, on sauvegardait les anciennes possessions de la Compagnie et l’on pouvait espérer conserver au moins quelques-unes des nouvelles acquisitions. En tout cas, on avait assez fait pour la gloire ; il fallait désormais penser à l’existence.
Au milieu de la crise, Dupleix, loin d’éprouver la lassitude générale, montrait au contraire une héroïque fermeté. Il restait sourd aux représentations, qu’on lui faisait de tous côtés sur la nécessité d’une entente avec les Anglais. Il pensait que rien n’est plus dangereux que de chercher à traiter au lendemain d’une défaite, et estimait qu’en pareil cas le devoir d’un homme d’État est