Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/235

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correspondre avec les princes qu’il fallait séduire. Sa réputation, son rang dans la hiérarchie des grands feudataires de l’empire mogol, — elle était souveraine de plusieurs nababies, — sa connaissance des mœurs et des préjugés de l’aristocratie du pays, sa science des cours asiatiques, ce terrain semé de pièges, sa perspicacité à démêler les intrigues qui s’y tramaient, son art à les nouer, son tact, sa libéralité, sa finesse, faisaient d’elle l’intermédiaire diplomatique le plus redoutable. Elle s’attaqua tout d’abord à Morari-Rao, dont elle flatta les ressentiments, et n’eut pas beaucoup de peine à le convaincre et à l’amener à servir ses projets.

À l’instigation de son mari, elle avait tout mis en œuvre pour créer un parti français dans le divan et le harem du Maïssour. Elle avait réussi et s’appuyait sur une fraction déjà puissante, qui, en prêchant l’alliance française, semblait plutôt avoir à cœur des intérêts nationaux que des désirs d’argent, quoique ce métal fût pour beaucoup dans le mouvement. Les partisans de madame Dupleix se livraient à ces menées souterraines et patientes, à ces intrigues compliquées, qui, dans les palais de l’Orient, produisent les revirements politiques.

Circonvenu par la majorité de ses officiers et de ses eunuques, gourmande par la favorite elle-même, excité par son ministre, Naude-Rajah arriva insensiblement à croire qu’il était le jouet des Anglais et de Méhémet-Ali-Kan, et qu’il y avait peut-être profit à abandonner la cause de ceux-ci, pour se rapprocher de Dupleix et de Salabet-Singue. Le prince était donc au point où madame Dupleix avait voulu l’amener, et le moment