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Page:Haraucourt - L’Âme nue, 1885.djvu/257

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LA VIE INTÉRIEURE.

Et je la reconnus, l’infernale géhenne
Où le Destin, bourreau, torture de sa haine
 Les fils maudits de Dieu,
Les parias qu’un songe égara dans leur route,
Et ceux chez qui l’espoir, dans les bourdons du doute,
 Sonna son couvre-feu ;


Tous ceux qui n’ont ni foi, ni désir, ni tendresse,
Tous ceux qu’un grand amour blessa d’une caresse,
 Et qui, las de souffrir,
Abandonnant leur être au hasard qui les pousse,
Attendent vibrer l’heure harmonieuse et douce
 Qui permet de mourir.


Ils étaient là, sans nombre, informes, lourds, inertes,
Les cadavres vivants massés en grappes vertes,
 Le cou dans un lacet :
Ils pendaient, pleins de morne et lugubre indolence,
Et le vent qui pleurait dans l’effroi du silence,
 Las et lent, les berçait…