Page:Haraucourt - La Légende des sexes, poëmes hystériques, 1882.djvu/101

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« Ma jambe qui s’évase est une urne d’ivoire ;
« Bien douce est au toucher l’épaisse touffe noire
« Que le ciseau sacré coupe au front des brebis,
« Mais plus doux est le poil qui frise à mon pubis
« Là, tout près… N’est-ce pas, déesse de Cythère,
« Je suis belle parmi les filles de la terre ?
« La fleur de ma jeunesse est éclose : mon sang
« Bouillonne à flots pressés dans mon cœur bondissant ;
« Mon torse d’indomptée est mûr pour tes caresses,
« N’est-ce pas ? Et pourtant, ô Mère des Ivresses,
« Personne, entre les fiers et bruns Phéniciens,
« N’a serré mes flancs nus sur la chaleur des siens !
« Oh ! prends pitié de moi, Reine ! Grâce… Je souffre !

« Comme un enfant qui, seul, se penche au bord d’un gouffre

« J’ai le vertige. Grâce… Un baiser ! Un amant…
« Des hommes ! Oh, je brûle ! »

« Des hommes ! Oh, je brûle !Elle dit.

« Des hommes ! Oh, je brûle ! Elle dit.Lourdement
La vierge se laissa retomber sur sa couche.
Les seins dressés, collant son bras chaud sur sa bouche,
Elle se tord, comme un bois vert sur les tisons ;
Ses os craquent. Son doigt, sous les folles toisons,