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LE PRISONNIER DE SON ŒUVRE

la trace d’une autre main, d’une autre bouche, à leurs frissons elle devinait ma pensée, et elle s’offrait, elle me tendait son corps blanc, et toute cette blancheur sans tache visible me disait clairement : « Voilà ! Cherche tant qu’il te plaît ! Coucou… Tu ne trouveras pas ! »

Elle riait dans mes mains tremblantes.

Elle ne protestait pas, ne se défendait pas, et tout autre que moi aurait pu croire que cette sécurité joyeuse ne masquait que de l’innocence ; moi-même, tout comme un autre, j’aurais pu y croire, à la fin, tant j’avais besoin d’elle, de l’aimer et de la garder ! Mais sitôt qu’elle voyait mes doutes s’assoupir dans la confiance, elle les ressuscitait, en me narguant de son rire mouillé, et elle répétait :

— Peut-être oui, peut-être non. À quoi bon chercher, puisque tu ne trouveras pas ?

Ou encore son rire disait :

— À quoi bon chercher ? Même si tu trouves, tu ne pourras pas me quitter !

Elle s’amusait à me rendre des baisers délicieux, pour m’affoler davantage, et ses baisers de praline me déclaraient en riant :