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Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/210

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LA PEUR

quand il a eu ses quatorze mois, impossible qu’il se tienne debout ; alors, on a bien vu qu’il avait une jambe un peu courte, ou la hanche, tenez, là, qui était faible, et qui pliait. Je l’aimais bien. Il me riait. Céline me le laissait, quand elle allait laver au puits. J’essayais de le mettre droit, et je halais sur sa jambe, pas trop fort, pour qu’elle allonge.

Un jour, un beau monsieur de Paris, qui se promenait sur nos grèves, était là à me regarder faire, et il dit comme ça : « Qu’est-ce qu’il a, ce petit ? » Et il le touche avec un air de s’y connaître.

— Vous êtes un médecin ? que je lui dis.

— Oui, dit-il.

Il remuait la tête et il n’était pas content. Je demande :

— Qu’est-ce que c’est avec le petit, s’il vous plaît ?

— L’hérédité, qu’il me répond.

— C’est mauvais, cette maladie-là ? Et d’où qu’il la prise ?

Il a ri un peu, pas beaucoup, et il m’a demandé :

— Le père boit ?

— Vous êtes sorcier ? que je dis.