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Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/240

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LA PEUR

Je donne mon adresse, et nous voilà roulant… À côté de lui, dans une boîte qui roule, enfermés tous les deux, ensemble, sauvés, et je l’ai maintenant : il est à moi, à moi, à elles ! Il ne nous échappera plus, on ne me le prendra pas ! Ah ! que je vais donc bien le faire mourir, et comme elle sera longue, la vengeance !

Je le regarde en face, et mon visage doit vraiment exprimer une joie intense.

— Eh bien ! Doutez-vous de moi toujours ?

— Tu es un frère ?

J’avais oublié le tutoiement. On ne pense pas à tout. Je réponds :

— Qu’est-ce qu’il te faut de plus, pour prouver que j’en suis ? Songe à ce que je risque en te tirant de là, et en te cachant. Je travaille à la police : chacun gagne son pain comme il peut, et tu vois comment je les aide. Rends-moi mon écharpe.

Il daigne sourire, et, en me restituant mon insigne, il demande avec suffisance :

— Alors, j’ai fait du bon ?

Il parle avec un accent étranger : je le croirais de France, s’il était plus loquace. Il ajoute :