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Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/258

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LA PEUR

Il riait encore, et il me présentait ses mains glorieuses. J’eus un invincible frisson en contemplant ces paumes, ces doigts qui avaient façonné la mort de Barbara et de Catalina ; malgré moi, je relevai les yeux vers les yeux de ce complice qui venait de prononcer sa condamnation, et qui, devant mes prunelles, recula d’épouvante.

Eh là ! Vais-je recommencer les sottises, et faire peur à mon gibier ? Tout de suite, je repris mon air de bon enfant, et je me jetai sur la couchette, avec une cabriole.

— On peut fumer, ici ?

— Et boire ! C’est le cercle de l’Humanité-Souffrante.

Pour me prouver que rien ne manquait au confort de son antre, il prit une bouteille, deux verres, une cruche, et nous prépara des absinthes.

— Hein, mon Jarguina, qu’est-ce que tu en dis ?

Je ne disais rien : je fumais, couché sur le dos, et pendant que l’infatigable Blasquez chantait les louanges de la chimie moderne et du repaire modèle, je regardais