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introduction

« Tu as donné la terre pour pâturage plein de charme à la vache qui fournit les offrandes, ô Mazda ! » Y. XLVI. 3.
Il n’est pas besoin d’insister là-dessus. La vache dont il s’agit ici ne peut être que la vache terrestre ; c’est celle que soigne le pasteur, celle qui vit dans les pâturages, celle qui fournit la matière des offrandes, la chair, le lait et le beurre et qui sert à notre nourriture, c’est celle qui circule dans les champs et que le méchant cherche à tuer. La métaphore des vaches-nuages, employée dans les Védas, n’a rien à faire ici ; l'Avesta l'ignore complètement. La vache que le pasteur désire posséder (Y. L. 5) est celle qu'Ahura a créée avec les eaux et les plantes {id. 7.), c’est elle aussi que le poète sacerdotal veut apprendre à soigner et à défendre contre les nomades pillards. Tels sont les traits historiques que l'on peut retrouver dans les Gâthâs et qui se rapportent à la plus ancienne période de la religion mazdéenne.
On remarquera en outre, quand nous en analyserons le contenu, qu’en maint passage tout est si simple, si naturel, que le poète doit certainement faire allusion à des faits contemporains. Là même où il s’agit de Zoroastre, le ton est souvent si peu élevé, si naïf qu’on a peine à y voir autre chose que l’expression du sentiment intime de l’auteur. Là, point de merveilles opérées, point de science surnaturelle. Le chantre avestique demande à son Dieu ses enseignements, mais sans penser à une révélation, à une apparition céleste. Il se plaint des difficultés qu’il rencontre, des persécutions dont il est l'objet ; il exhorte les bons et menace les méchants qui l’entourent. Il appelle à lui des auditeurs. Ces hymnes ressemblent tout à fait à des prédications de circonstance. On trouverait peut-être l’explication de tout ceci, si l'on pouvait admettre I'opinion de Haug relativement à la valeur du mot Zara-thustra. D’après le savant essayiste, Zarathustra serait le titre de la dignité sacerdotale du prêtre mazdéen ; Çpitâma serait le nom propre du fondateur de la religion avestique. Haug s’appuie sur ce fait que le nom de Zarathustra sert parfois dans l'Avesla à designer le prêtre mazdéen, le chef spirituel d’une communauté religieuse et même le chef d’une localité gouvernée par un grand prêtre. Le superlatif de ce mot « Zarathustrôtema » est le titre du chef suprème de la religion avestique.
Mais cette circonstance s’explique très naturellement. L’Atharvan représentant Zarathustra chef de la religion, parlant en son nom et en vertu de ses mérites, le substitue métaphoriquement à sa propre personnalité. Il est Zarathustra, comme le prêtre bouddhique est Bouddha.
On pourrait toutefois se demander à laquelle de ces deux opinions on doit donner la préférence ? La réponse à cette question est très facile. L’emploi du mot Zara-thustra comme nom commun est rare et tout d’exception ; on ne le trouve que dans des prières où le prêtre intervient directement. Partout ou il est parlé du fondateur du zoroastrisme, où sont relatés des faits qui le concernent, celui-ci est appelé Zarathustra, sans plus. Au moment où il vient de naître, les Dévas se sentent invinciblement frappés. Ils se troublent, ils se rassemblent et s’écrient : « Malheur à nous ! il est né le pur Zarathustra ! » Si Çpitâma eût été le nom du nouveau-né, les Dévas l’eussent-ils désigné par une appellation générique qui prêtait matière à confusion ? Cette réflexion est applicable à tous les cas où Zoroastre est mentionné à la troisième personne. Il est bien rare alors que Çpitâma soit employé, Zarathustra l'est géné-