Page:Harvey - La Circulation du sang, trad. Richet, 1879.djvu/97

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la voie de passage du sang, et qu’il ne pouvait trouver le vaisseau qui partant du cœur lance le sang dans tout le corps.

Mais si, à l’appui de l’opinion d’Érasistrate, opinion qui est la nôtre, et qui, de l’aveu de Galien, est conforme à la raison ; si, dis-je, on avait pu montrer du doigt une grande artère distribuant dans toutes les parties du corps le sang chassé du cœur, je voudrais savoir ce qu’eût dit ce grand et divin génie. S’il eût dit que les artères distribuent l’esprit vital et non le sang, comment aurait-il pu réfuter Érasistrate qui prétendait qu’il n’y avait dans les artères que l’esprit vital ? Certes il se serait alors contredit lui-même, reniant impudemment les idées qu’il soutient ardemment dans ses ouvrages, contre ce même Érasistrate, lorsqu’en s’appuyant d’un grand nombre d’arguments excellents il démontrait par des expériences que, dans les artères, à l’état normal, il y a du sang et non de l’air.

Au contraire, cet homme divin reconnaissait, comme il le dit dans le même ouvrage, que toutes les artères du corps prennent naissance dans une grande artère, et que celle-ci vient du cœur, et que dans les artères le sang se trouve contenu et mis en mouvement. Les trois valvules sigmoïdes, situées à l’orifice de l’aorte, empêchent le retour du sang dans le cœur, et la nature ne les aurait pas placées dans un organe aussi parfait, si elle ne leur eût assigné une immense fonction à remplir. Ainsi, le père de la médecine reconnaîtrait expressément cette vérité, et il la reconnaît, comme on peut le voir en lisant son livre.